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Enquête interne : l'art contemporain à bout de bras (mars 2021)

RÉSUMÉ
Après la fermeture qui affecte la plupart d’entre elles depuis près de 6 mois et enraye les efforts entrepris dans la structuration de leur activité et le développement de leurs publics, les structures du réseau PAC/Provence Art Contemporain affichent plus que de la lassitude, mais leurs efforts restent tournés vers l’avenir.
Entre le 10 février et le 10 mars 2021, une enquête de 35 questions leur a été adressée.
Avec un échantillon de 31 répondants (50% de l’effectif visé), l’enquête peut être perçue comme apportant des éléments significatifs quant à la situation rencontrée par les structures du réseau.
Les questions ont porté sur le statut des structures, leurs missions et leur dimension, leurs rapports économiques avec les artistes, l’accueil des publics, le soutien des collectivités et de la puissance publique, et enfin l’évolution contrainte par la situation pandémique.

STATUTS ET MISSIONS DES STRUCTURES
Sans qu’il s’agisse d’une particularité du territoire, les initiatives art contemporain sont très largement portées par le secteur associatif : 67,9% des répondants évoluent dans des associations loi 1901.
La part du secteur privé marchand dans l’échantillon révèle une surprise : 25% des répondants sont des entreprises.
Une forte polyvalence traverse les catégories : 89,2% des répondants assument des missions dans au moins 3 fonctions, la combinaison la plus fréquente étant organisation d’expositions + production d’oeuvres + accueil d’artistes en résidence.
Les acteurs se perçoivent ainsi comme autonomes et en maîtrise d’un éventail de compétences, et inscrivent leurs projets dans une chaîne d’actions successives aboutissant à la diffusion : on peut parler d’écosystème.

DIMENSIONS DES STRUCTURES ET DES PROJETS
Le paysage semble reposer sur un socle important d’acteurs de dimension modeste.
Ainsi, les réponses aux questions portant sur la superficie, les budgets affectés à chaque projet et les effectifs stables des structures convergent :
• 45,5% des lieux disposent d’une superficie inférieure à 200m2
• 35,7% des structures disposent d’un budget inférieur à 2.500€ par projet
• 38,5% des structures diposent d’un effectif stable inférieur à 3 personnes.
La capacité d’accueil reste pourtant forte : 34,6% des répondants accueillent plus de 20 personnes par jour d’ouverture, dont 7,7% plus de 200.
La précarité de leurs conditions matérielles n’obère que peu une grande ouverture au public.

UN TRAVAIL COLLECTIF…
Alors que 97% des répondants déclarent rémunérer les artistes monétairement,
ce taux très élevé recoupe des modalités différentes : 57,1% s’acquittent des droits de présentation publique sur facturation des artistes, alors qu’un panel de 25% (correspondant aux galeries) reverse la part revenant aux artistes suite à la vente des oeuvres.
La production des oeuvres représente un autre pan du financement apporté aux artistes par les structures de diffusion : 69,2% des répondants déclarent produire les oeuvres préalablement à leur exposition, la catégorisation privé non marchand/ privé marchand ne se retrouvant que partiellement dans ce découpage.
Enfin, 67,7% indiquent travailler avec d’autres professions indépendantes que les artistes : parmi les réponses les plus fréquentes, 27,4% font état de collaborations régulières avec des commissaires et critiques d’art, 23,4% avec des professionnel•le•s de la régie et du montage, 21,7% avec graphistes ou photographes.
L’impression d’écosystème impliquant une multiplicité d’acteurs, et d’emplois, se confirme.

… TOURNÉ VERS LE LOCAL…
Si 60,7% des répondants indiquent accueillir moins de 10 artistes par an, 25% en accueillent au plus 4 sur la même périodicité.
La forte concentration d’artistes sur le territoire trouve un écho naturel dans les lieux de diffusion : 42,9% des répondants accueillent plus de 50% d’artistes locaux dans leur programmation annuelle.
Ce tropisme local se retrouve quelle que soit la taille et le niveau d’influence des structures, puisque les répondants disposant des budgets les plus importants ne se détachent pas de la tendance générale : l’attachement à la scène locale ne semble pas se faire à l’économie.
Cette offre rencontre un public local régulier : 77,8% des répondants estiment accueillir plus de 50% de public régional.
En outre, alors même que 50% ne disposent pas de services des publics, 86,3% organisent des accueils spécifiques pour les scolaires et les publics du champ social ; pour 63,3% d’entre eux, ces publics prioritaires représentent au moins 200 visiteu•rse•s par an, sans que cette activité ne soit financée pour 40% d’entre eux.

… MAIS UN SOUTIEN INSTITUTIONNEL À RENFORCER
Alors que les lieux de diffusion sont en entrée libre et gratuite (97%), le soutien de la puissance publique s’avère vital pour les 53,6% de structures dont la capacité d’autofinancement, en particulier lié au mécénat, plafonne à 25% de leur budget annuel.
La part de structures ne bénéficiant pas de soutien pour leurs projets (32,1%) ou pour leur fonctionnement (42,9%) excède le seul panel de structures inscrites dans le secteur privé marchand : 54,5% des structures sans soutien sont des associations.
Les répondants font par ailleurs état d’une disparité dans le soutien acordé par les différentes collectivités : si 20% indiquent qu’elles n’ont pas été aidées par leur municipalité, ce taux monte à 40% pour le Département et au même niveau pour la Région.
La lourde charge administrative qu’implique le millefeuille institutionnel pour les structures ne récompense que partiellement le dynamisme de l’écoystème local.

EFFETS DE LA CRISE SANITAIRE SUR LES STRUCTURES
Comptant sur la dynamique et la visibilité apportées par des événements comme Africa 2020 et Manifesta, la majorité (51,8%) des répondants avait programmé pour 2020 un nombre plus important de projets que les dernières années.
En raison de la situation pandémique, 85,7% de ces projets ont dû être annulés ou interrompus, et plus d’un quart des projets ont pu être différés (25,9%).
Pour plus d’un tiers des répondants, la cause des annulations ou des reports est multiple : 23,7% évoquent l’impossibilité de déplacement des artistes (ce chiffre attestant de l’ouverture à l’international spécifique à 2020), et 10,5% des motifs liés aux baisses de financement de partenaires ou à la frilosité générale.
Par ailleurs, 79,2% des structures n’ont pas bénéficié des fonds de soutien mis en place par la puissance publique, et seuls 16,7% ont pu différer cotisations sociales et loyers.
Enfin, le maintien du lien à distance (solution adoptée par 57,1% des structures) s’est opéré à moyens humains constants, occasionnant un surcroît de travail pour 76,9% des répondants.

EFFETS DE LA CRISE SANITAIRE SUR LES PUBLICS
Si les galeries ont vu leur public augmenter, signe d’une appétence maintenue pour la culture et d’un report vers les seuls lieux ouverts, les publics des autres lieux (89,3%) n’a pas augmenté -il a même diminué pour 57,1%- : l’effort de visibilité à distance n’a pas porté les fruits escomptés.
La tendance est sans surprise une homogénéisation des publics, constatée par 56,5% des répondants : si l’ouverture aux seules visites professionnelles a permis de poursuivre une activité de diffusion, cette modalité contribue à restreindre l’action d’ouverture aux publics éloignés.
Ainsi les structures enquêtées relèvent- elles en réponse libre d’une part la moindre disponibilité des publics et d’autre part l’arrêt de l’accueil de scolaires.

CONDITIONS POUR UNE REPRISE
Dans la crise actuelle, l’art contemporain semble pourtant bénéficier de davantage d’atouts que d’autres secteurs, pour 67,9% des répondants : d’abord parce que les lieux d’exposition sont plus simples à rouvrir que les autres lieux (pour 42,9%), ensuite parce que les interrogations de ces artistes permettent de mieux comprendre la société actuelle (pour 25%). Une minorité non négligeable (28,6%) relève pourtant que les fragilités liées à l’insuffisance de financement constituent un frein majeur.
La réouverture devra pourtant être soutenable : 36,4% déclarent qu’elles pourraient accueillir les publics dans de bonnes conditions avec une jauge de 4m2 par visiteu•r•se, taux d’occupation raisonnable au regard de la petite taille de leurs structures.
Les répondants concluent en réponse libre que leur détermination à partager le travail des artistes est parvenu jusqu’ici à alléger le poids de l’incertitude et de l’anxiété générées par la situation actuelle. Il faudra veiller à ce que les difficultés de trésorerie ne viennent pas faire dérailler ce dynamisme. À cet endroit, la puissance publique aura à jouer un rôle refondateur.