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Lettre ouverte aux candidat•e•s aux municipales à Marseille

ADRESSE DE MARSEILLE EXPOS AUX CANDIDAT•E•S AUX ÉLECTIONS MUNICIPALES

Mesdames et Messieurs les candidat•e•s aux élections municipales de 2020,

Regroupant depuis 12 années les volontés des lieux, opérateurs, structures et associations œuvrant pour la diffusion et la promotion de l’art contemporain auprès du public à Marseille et dans son agglomération, Marseille Expos est devenu le plus grand réseau territorial d’art contemporain en France, fédérant aujourd’hui plus de 50 membres actifs.
Marseille Expos est ainsi la cheville ouvrière de la structuration de l’ensemble de la filière professionnelle art contemporain sur le territoire : le réseau endosse à ce titre la mission d’organiser le SODAVI (Schéma d’orientation des arts visuels), confiée par le Ministère de la Culture.
Chaque année, nos équipes, qui comptent plus de 100 employé•e•s, accueillent plus de 200.000 personnes, amateurs ou enfants scolarisé•e•s, touristes ou Marseillais•es, et leur permettent de se confronter au travail de centaines d’artistes, vivant et travaillant ici ou venu•e•s pour un projet spécifique.

Qu’est-ce que le contemporain ?
« Contemporain est celui qui reçoit en plein visage le faisceau de ténèbres qui provient de son temps. » écrivait Giorgio Agamben.
Les artistes, et celles et ceux qui au quotidien les accompagnent ou les fréquentent, puisent dans notre inconscient collectif pour mettre à jour les formes qui nous réunissent.
Les réaliser, y avoir accès, les comprendre, constituent autant de possibilités de saisir ce qui fait la marche du monde, de s’y inscrire et d’y agir.
L’art contemporain est déjà, à ce titre, profondément politique : la création artistique est un bien commun qui concerne l’ensemble de la communauté des hommes et des femmes qui vivent dans le même temps.
L’art contemporain, c’est également un secteur économique, qui depuis 2013 fait tourner la machine Marseille, qui depuis 2013 fait tourner toutes les têtes vers Marseille, capitale d’une création fraîche, éruptive, sans concession.

Marseille est à un tournant de sa longue histoire : c’est tout le secteur de l’art contemporain, ses professionnel•le•s et ses publics, qui s’adresse aujourd’hui à vous.

Nous voulons connaître vos intentions sur l’éducation artistique et culturelle.
Celle qui sera destinée aux plus jeunes d’abord, pour que l’école leur donne accès, de façon égalitaire, à une culture trop souvent encore réservée aux enfants des plus privilégié•e•s et assurent à ces derniers plus de possibles qu’aux autres. Le FCAC a ici un rôle majeur à jouer.

Celle aussi qui aiguisera le regard des publics adultes, au-delà des loisirs culturels proposés par les seuls acteurs commerciaux.
Nous n’opposons pas aux produits de consommation culturelle dits populaires un art contemporain qui serait quant à lui élitaire : les fréquentations en sont complémentaires. Mais nous pensons que beaucoup reste à faire pour donner en partage les recherches et expressions artistiques d’aujourd’hui : la puissance publique ne peut pas laisser ce rôle au seul marché.

Nous voulons connaître vos intentions sur la place de l’artiste au sein de la cité.
Alors que la région Sud compte près de 17.000 artistes plasticien•ne•s, dont la vaste majorité est basée à Marseille et dans les Bouches du Rhône, la municipalité ne dispose que de 13 ateliers d’artistes, qui leur sont proposés pour une durée maximale de 23 mois.

D’autres villes en France ont adopté des dispositifs davantage susceptibles de soutenir la recherche et le développement des artistes : ateliers-logements appuyés sur les baux de logements sociaux à Paris, remise aux normes et exonération de loyers de friches industrielles à Lille, plateaux de travail collectifs mutualisés et équipés à Lyon – à Montreuil, 108.000 habitant•e•s, on compte 50 ateliers destinés aux artistes, 40 ateliers-logements à Ivry s/Seine, 60.000 habitant•e•s, 20 à Auvers s/Oise, 7.000 habitant•e•s…
Si l’accompagnement du parc est aujourd’hui entre de bonnes mains, nous croyons que la collectivité peut et doit faire plus, en mettant à disposition des artistes des espaces inutilisés, en indexant la construction d’ateliers et d’ateliers-logements sur la nécessaire construction de logements sociaux, en soutenant encore plus clairement le développement des résidences d’artistes dans l’ensemble de la ville.

Alors que la presse nationale vante Marseille comme l’eldorado des jeunes artistes, l’accueil d’artistes étranger•e•s doit être une priorité parallèle à l’amélioration des conditions de vie et de travail des artistes locaux : Marseille s’est toujours enrichie en favorisant les croisements, les rencontres et les échanges, elle ne saurait demain se replier sur elle-même.

Nous voulons connaître vos intentions sur le soutien à nos structures.
MP2013 a été un formidable coup d’accélérateur : de nombreux lieux ont vu le jour, et leur rayonnement sur différentes échelles, internationale, nationale ou de proximité, confirme la vitalité de la ville.
Du géant du J4 aux artist run spaces de Belsunce, c’est la complémentarité qui prévaut : le réseau Marseille Expos est le symbole de cette solidarité qui définit notre écosystème.
La diversité des esthétiques, des statuts, des publics, ne masque pas une condition commune : nos structures ont besoin du soutien financier de la municipalité pour fonctionner.
Alors que se profile la perspective de nouveaux équipements et de nouveaux événements, nous vous alertons sur les besoins qui restent à combler pour les structures déjà existantes et leurs initiatives, qui attirent d’année en année dans notre ville des visites professionnelles, éclairées ou curieuses de plus en plus nombreuses.

Aux côtés des artistes, les membres de Marseille Expos génèrent du sens en produisant des contenus dont les publics peuvent s’emparer pour décoder et construire le monde d’aujourd’hui. Nous voulons participer activement à cette construction : c’est cette démarche qui guide notre adresse d’aujourd’hui, résolument tournée vers demain.

Nous avons été, sommes et serons des partenaires attentifs, contributifs et attaché•e•s au modèle républicain qui fait de l’art contemporain un lieu commun essentiel à notre vivre ensemble.
Nous sommes aujourd’hui impatient•e•s de découvrir vos visions.

Le texte et l’interview en pdf ici.